Cultures co – 13/02/2023

TIO MANUEL – ¡Ocho!
Tio Manuel

Pochette de Jo Pinto Maia – Photo de Fred Cyclope Glx

Tio Manuel monte dans son pick-up. Il a un bout de route à faire, de ces longs tracés bitumés qui parcourent les étendues sauvage des racines musicales. Sa guitare acoustique est sur le siège, à ses côtés. Dans son sac de voyage, on devine les formes d’une Gretsch et son ampli à lampes, d’un dobro, d’un saxophone, d’un harmonica et d’un accordéon. Bottleneck sur l’annulaire, il tourne la clé de contact puis s’éloigne dans un nuage de poussière. Si les pulsations sourdes du moteur rythment sa chevauchée, pour rythmer son cœur, il insère ¡Ocho! dans le lecteur de CD.

TIO MANUEL – Pasando Chanaral

Manuel reprend en anglais ou en espagnol les paroles exhalées par la sono. Le mariage de sa voix aux instruments évoque Johnny Cash, Bashung, Dylan, la diction, le timbre s’approchant d’un Lou Reed ou d’un Kim Fowley ; plutôt ancré dans les graves. Le grain narratif apporte aux récits l’âpreté nécessaire, celle du guerrier, de l’homme des hautes plaines revenu de tous les combats. Ainsi caréné, ¡Ocho! délivre un rock séducteur qui coopte ses confrères et consœurs, folk, country et boogie parfois teintés cowboy, cajun ou acadien : blues.

TIO MANUEL – Bad Cloud Blues

Jouée slide, les accents de la Gretsch soutiennent les mélodies. Au cœur du cocktail, entre deux traversées de tumbleweeds évanescents, un trait d’orgue Hammond alimente la potion. Bercés par l’ensemble de ces options au service d’un rock dru, sans artifices, le vécu de l’artiste sert sa légende, celle d’un homme discret aux convictions profondes, esprit rockabilly compris.

TIO MANUEL – Skinny Girl

Pour ¡Ocho!, Manu Castillo (Tio Manuel) a puisé son inspiration tant aux pieds des Yucca Brevifolia qui parsèment le désert de Mojave qu’au contact des briques noircies par les vicissitudes urbaines. Jus de cactus et gaz d’échappements épousent sans doutes la double hélice de son ADN. Pour l’auditeur, ils transparaissent dans les mots et les notes telle une offrande, une aubaine.

¡Ocho!, huit ? Huitième livraison, huitième centre cible, huitième passage obligé pour celles et ceux épris de musique viscérale, de sincérité.

Thierry Dauge